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core du temps d'Alexandre, les Lélèges se prêtaient au rôle de serviteurs chez les Cariens 1).

La racine -anda reparaît dans le nom du bourg de Kelenderis, près duquel était situé le port de Trézène appelé záy wv (c.-à-d. „barbe“). Or, Kelenderis est en même temps un endroit bien connu de la Cilicie, situé lui aussi sur la mer. Les deux Kelenderis, comme les deux Salamine, sont apparemment dans le rapport de métropole à colonie. Si la première syllabe du nom contient l'abréviation du mot xixi dont l'origine est sémitique: p, part (xλñpos) —, il faudrait voir dans le grec KɛλévΚελένSepic d'abord une factorerie phénicienne; mais on peut y trouver un mot dont le sens serait bâtiment, le grec xéλns ou même l'hébreu.

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Des noms de ville composés avec anda, comme premier élément du mot, on pourrait en citer des douzaines, dans la Cappadoce, dans la Paphlagonie (Andabalis, Andrapa, Andraca) et plus loin dans la Macédoine, dans la très illyrienne Dalmatie ("Avdpápiotos, "Avdúpiov), dans la Pannonie, dans la Gaule et en Espagne. Nous sommes loin de vouloir expliquer tous ces noms à l'aide de l'albanais Tévia. Pour l'Espagne, les mots composés avec anda se ramènent au basque.

Nous ne pouvons quitter cette recherche sans exprimer la conviction que le verbe vтévia est un de ces mots primitifs (pélasgiques si l'on veut) qui ont fait leur chemin surtout dans les pays du Midi. L'italien andar, le provençal anar, notre aller, verbes que Diez essaie de ramener à ambulare, aditare, à nos yeux ne sont autre chose que l'albanais ou le lélège évtévia légèrement modifié.

III.

RAPPROCHEMENTS ULTÉRIEURS.

On n'ignore plus que les Phéniciens avaient su pénétrer dans l'antique et immobile Arcadie. D'un autre côté nous y trouvons bien des noms qui n'ont rien d'obscur pour une oreille albanaise. La ville de Zovuaria ne paraît être autre

1) Athénée, VI, 267.

Laconie. Lélèges, Pélasges, Caucones sont placés à peu près sur la même ligne par Strabon (XII, 8, 4), et si l'Arcadie passait pour la plus ancienne patrie des Pélasges, Lélex est appelé le plus ancien habitant, ou mieux le plus ancien roi des autochthones de la Laconie (Pausan., III, 1, 6. IV, 1, 6) 1). Son second fils, Polycaon, aurait fondé un nouveau royaume, que du nom de sa femme Messène il aurait appelé la Messénie. Il y aurait bâti une ville, nommée Andanie, destinée à être la résidence des rois du pays. Le philologue Benseler 2) fait venir le nom de cette ville du verbe vdável et il traduit: ville agréable. C'est comme s'il on voulait former des verbes λaμβάνειν, μανθάνειν des substantifs λαμβανία, μανθανία. Le petit vocabulaire albanais de Xylander, bien suranné aujourd'hui, me fournit ici un trait de lumière. J'y lus: vdeviy, je m'arrête, j'étends, j'étire; participes: vdεpα, vdεiтoupa, étendue; devjoupa, vdeiтkeja, habitation, séjour, loisir 3). Il est vrai que les Grecs, pour désigner la ville tout court, ont préféré un verbe qui désigne le mouvement: Ορχομενός, Ελευσίς, Ελευθεραί trouvent leur explication dans le verbe ἔρχεσθαι. Si à leurs yeux, le village, la ville étaient des êtres vivants, les rivières ne l'étaient pas moins; nous citerons: Gangas, le Gange; Padus, le Po; l'Eleutheros de la Syrie. Le mouvement rapide est surtout sensible dans Pῆνος, Ρόδανος (rac. ῥίεθ ou ῤῥέθ).

C'est ainsi que s'explique le nom de la ville d'Avdsipa, située dans la Troade, qui, d'après le témoignage de Strabon (XI, 526, 56), appartenait aux Lélèges; puis celui de l'Andirus, affluent du Scamandre. La ville d'Antandros était pareillement attribuée aux Lélèges. Son nom comme celui de l'île d'Andros se rattache manifestement à depa. Une ville de la Carie, Bapyúλia, passait pour avoir un ami de Bellérophon, Bargylos, pour fondateur. Mais elle était appelée "Avdavov, par les Cariens; peut-être faut-il lire ici: Lélèges. Nous avons dit plus haut que, les deux peuplades étaient singulièrement mêlées ensemble. En

1) Nous renvoyons ici une fois pour toutes à notre ouvrage: La Grèce les Grecs, p. 52 et suiv. Maisonneuve & Co., Paris, 1877.

2) Benseler a donné une seconde édition du Dictionnaire des nom

de Pape.

3) Le vocabulaire de Xylander ne donne que la forme vr

sont empruntées au Dictionnaire de Hahn.

core du temps d'Alexandre, les Lélèges se prêtaient au rôle de serviteurs chez les Cariens 1).

La racine -anda reparaît dans le nom du bourg de Kelenderis, près duquel était situé le port de Trézène appelé πwуwv (c.-à-d. „barbe"). Or, Kelenderis est en même temps un endroit bien connu de la Cilicie, situé lui aussi sur la mer. Les deux Kelenderis, comme les deux Salamine, sont apparemment dans le rapport de métropole à colonie. Si la première syllabe du nom contient l'abréviation du mot xixi - dont l'origine est sémitique: p, part (xλñpos), il faudrait voir dans le grec Keλévdepis d'abord une factorerie phénicienne; mais on peut y trouver un mot dont le sens serait bâtiment, le grec xéλns ou même l'hébreu ??.

Des noms de ville composés avec anda, comme premier élément du mot, on pourrait en citer des douzaines, dans la Cappadoce, dans la Paphlagonie (Andabalis, Andrapa, Andraca) et plus loin dans la Macédoine, dans la très illyrienne Dalmatie (Avdpápioτos, "Avdýpiov), dans la Pannonie, dans la Gaule et en Espagne. Nous sommes loin de vouloir expliquer tous ces noms à l'aide de l'albanais vrévia. Pour l'Espagne, les mots composés avec anda se ramènent au basque.

Nous ne pouvons quitter cette recherche sans exprimer la conviction que le verbe vévia est un de ces mots primitifs (pélasgiques si l'on veut) qui ont fait leur chemin surtout dans les pays du Midi. L'italien andar, le provençal anar, notre aller, verbes que Diez essaie de ramener à ambulare, aditare, à nos yeux ne sont autre chose que l'albanais ou le lélège évtévia légèrement modifié.

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chose que l'alb. rouμstia, foule de peuple; xvela fait penser ἃ τοκέα, terre ferme, ou à τόκγου, pli; Λύλη rappelle l'alb. ajouaje, fleur; la rivière Aúua ne s'éloigne guère de l'alb. ajovus, fleuve, ou de xjuuάxje, branche parasite.

A l'Ouest nous rencontrons Пúλos, nom porté par trois villes situées dans l'Élide, dans la Triphylie et dans la Messénie. Nélée n'était pas le fondateur de ces villes: leur nom indique une origine lélègique. Encore aujourd'hui, Tuλ veut dire „bois, forêt" en albanais. Il y avait une ancienne ville Pyléné dans l'Éolie, et un Пúλαιov opos (montagne boisée) dans l'île de Lesbos. Hahn, qui connaît cette étymologie, fait remarquer que Pylade était appelé naturellement l'ami inséparable d'Oreste, l'un tirant son nom des bois, l'autre de la montagne 1). Il a été peut-être plus heureux en expliquant l'origine du nom du promontoire de Malée par l'alb. mall-ji, mont. C'est le cas de citer la ville de Aipaλλov en Illyrie, située sur deux collines. Par contre, la ville de Auros dans l'Eubée pourrait bien répondre à l'alb. dúσTEX plaine, campagne 1).

Citons parmi les noms d'îles celui d'Oliaros, île où l'on pêchait le célèbre coquillage et où l'on teignait en couleur de pourpre les étoffes précieuses. Or, ajápory veut dire en albanais: je teins; ajapós, bigarré, multicolore. L'O ne paraît être que l'article sémitique ha, hal ou al. Il y a longtemps que l'on a expliqué le nom de l'île de Délos, l'île du dieu du soleil, par l'alb. die, dia, soleil. Dans l'île de Salamine, une des premières colonies phéniciennes de l'archipel, la patrie du Lélège Teucer, il y avait un fleuve Báxapos, qu'on appela plus tard: Baxaλios, mauvaise traduction par laquelle on défigurait l'ancien mot Boúxoupa, signifiant beau" en albanais. On nous apprend en même temps que les Trézéniens appelaient le printemps: Baxapos, probablement: la belle saison.

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S'est-on jamais avisé d'expliquer le nom du mont Olympe par une étymologie grecque? Tout le monde ne sait pas qu'il y a beaucoup de monts ainsi dénommés. Lorsqu'on ne le déterminait pas autrement, on entendait par là la chaîne qui sépare la Macédoine de la Thessalie. Il y avait un autre Olympe

1) La Grèce avant les Grecs, p. 100. 101 et suiv. La plupart de nos constatations étymologiques sont extraites de ce livre.

bien connu, près d'Olympie, dans l'Élide, un troisième dans la Mysie, qui de l'Hermos s'étendait jusqu'à la Bithynie, un quatrième dans la Lycie, dont Strabon voudrait encore distinguer un cinquième dans la Cilicie 1), enfin un sixième dans l'île de Chypre, avec un temple d'Aphrodite 'Axpala. Que peut-on conclure de ces homonymies si ce n'est que la race qui désignait ainsi par le même nom, des montagnes si différentes, était la même, et que des hommes de cette race avaient habité où ces monts se trouvaient. Dans le vocabulaire de Xylander nous lisons: OUλioÚжEp, arc ou cercle. Considérons maintenant qu'il y avait à Samos un mont KeρxETEús, et que l'on rencontrait des KEρXÉTIα oрn au Nord de la vallée haute du Pénée. Ajoutons que xéρxos, alb. xjxpxov, ital. cerchio, ont le même sens que l'alb. oùλioúμTEр, que les notions de montagne et de rondeur se rapprochent assez, et on ne sera peut-être pas très osé en affirmant que l'Olympe portait un nom illyrien, c.-à-d. albanais ou lélège 2).

IV.

RAPPROCHEMENTS DE NOMS DE DIVINITÉS.

Ce n'est peut-être pas Hahn qui le premier a signalé la ressemblance de l'alb. Božja, neige, avec le gr. Bopiãs ou Bopéas, aquilon; de l'alb. der, mer, avec le nom de la déesse Thétis; du mot veuέOTI, quelqu'un qui jure ou maudit (du v. vɛ, maudire), avec le nom de la déesse Neueris; enfin de l'alb. dé, terre, avec da (quoique dé soit masculin) dans ▲aárne. Après tout on n'a jamais dit: rauare, mais toujours: Aaμάτup. Hahn ne manque pas de citer l'ancien nom de la déesse An3). Il propose aussi de rattacher le nom de la mère de Juppiter, Rhéa, qui passait pour avoir enfanté aussi les premiers hommes et tous les êtres organisés et dont la puissance fécondante est visible dans la nature entière, à l'adjectif alb. ɛ, nouveau, jeune, frais, et à son féminin jeja, fiancée, nouvelle épousée. A coup sûr, le mot 'Péx n'est pas grec.

1) Strabon, XIV, p. 567. 568.

2) La Grèce avant les Grecs, p. 81. 82.

3) Hahn, p. 251.

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