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Mais la masse de la succession ne peut être formée et les lots ne peuvent être composés, qu'après qu'il a été statué sur les rapports que certains héritiers peuvent être tenus de faire en nature, sur les prélèvemens qui, au défaut de ces rapports, doivent être exercés par les autres héritiers, sur les dons ou legs faits à titre particulier, par le défunt, soit à des héritiers, soit à des étrangers, et enfin sur les comptes à régler, entre les héritiers, des sommes que chacun d'eux peut devoir, ou peut avoir le droit de répéter, à cause de la succession.

Il est évident que le partage ne peut être fait que sur des choses communes et déterminées, et qu'après que tout ce qui peut augmenter ou diminuer la masse partageable, se trouve définitivement réglé.

3. Sur tous ces objets, il peut s'élever de nombreuses difficultés, et c'est pour éviter les frais et les embarras de la discussion devant le tribunal, qu'il a été statué, par l'art. 828 du Code civil et par l'art. 976 du Code de procédure, que cette discussion aurait lieu d'abord devant un notaire, d'après un renvoi qui serait prononcé par le juge-commissaire.

Il est dit, dans ces articles, que le notaire doit être nommé d'office par le tribunal, si les héritiers ne s'accordent pas sur le choix. 4. Avant le Code de procédure civile, on doutait si le renvoi devant un notaire était obligé, ou simplement facultatif.

Plusieurs dispositions du Code civil autorisaient même à penser que tout ce qui concernait les partages avec les mineurs devait être fait par les tribunaux. L'art. 466 dit même expressément que, pour obtenir tout l'effet qu'ils auraient entre majeurs, ces partages doivent être faits en justice, et l'art. 838 répète la même injonction pour le cas où il y a, parmi les héritiers, des mineurs, des interdits ou des non présens.

De ces dispositions, beaucoup de jurisconsultes avaient induit que toutes les opérations de ces partages, même la liquidation des droits des intéressés, les formations de masses, les compositions de lots, étaient du ressort des tribunaux, et devaient être faites, ou par eux, ou par des commissaires pris dans leur sein.

Cette opinion paraissait avoir dominé dans la première rédaction

du Code de procédure civile; on y lisait un article portant que, si le juge-commissaire ne jugeait pas à propos de faire lui-même le partage, il renverrait les parties devant un notaire.

Les notaires, effrayés de cette disposition qui allait les priver de l'une de leurs attributions les plus lucratives, réclamèrent contre le projet, et ceux de Paris s'adressèrent au conseil d'état; les avoués de la même ville demandèrent au contraire que la disposition fût adoptée, et il y eut de grandes discussions de part et d'autre.

La question fut résolue en faveur des notaires. Le 22 février 1806, dans une séance présidée par le chef du gouvernement, le conseil d'état arrêta en principe, 1o que les opérations du partage ne seraient pas faites par le juge- commissaire, qui renverrait, à cet effet, les parties devant un notaire; 2° que le notaire ne déposerait pas au greffe la minute du procès-verbal de partage, mais qu'il en remettrait seulement l'expédition à la partie la plus diligente, pour en suivre l'homologation devant le tribunal.

Cette délibération produisit les articles 975, 979, 980 et 981 du Code de procédure civile, avec lesquels il faut coordonner les articles précités du Code civil.

Ainsi, c'est devant les notaires que les opérations des partages doivent être faites c'est devant eux qu'il doit être procédé aux comptes, rapports, formations de masse, prélèvemens, compositions de lots et fournissemens. Ces opérations leur appartiennent, même quand il y a lieu à licitation. L'adjudication se fait bien en justice, ainsi que le prescrit l'article 839 du Code civil; mais le prix doit être compris dans la masse générale de la succession, qui ne peut se former que devant un notaire.

Il est donc aujourd'hui incontestable que les tribunaux ne peuvent retenir le matériel des partages, et s'ils ne le peuvent pour le tout, ils ne le peuvent pas plus pour quelques objets. La loi n'a pas voulu qu'ils fissent les fonctions d'officiers instrumentaires; elle leur en a donné de plus relevées. Elle les a institués juges des différens, s'il s'en élevait; surveillans des opérations, quand leur autorité est invoquée, et censeurs de ces opérations, quand elles sont terminées, puisqu'elles ne peuvent avoir d'effet que par l'homologation.

Par arrêt du 17 août 1810, la cour royale de Paris a infirmé un jugement du tribunal civil de Dreux, en ce que le jugement avait ordonné qu'un partage serait fait devant le tribunal; émendant quant à ce, elle a ordonné qu'après la confection des opérations préliminaires d'expertise des biens, et de vente par licitation, s'il y avait lieu, les immeubles en nature, ou le prix provenant de la vente par licitation, dans les cas où elle serait effectuée, seraient réunis à la masse mobilière, pour du tout être composée une seule masse, et procédé à un seul partage, conformément aux dispositions de l'art. 828 du Code civil et de l'art. 976 du Code de procédure civile.

5. On verra dans les articles suivans tout ce qui est relatif aux rapports, aux prélèvemens, à la formation de la masse et à la composition des lots.

En ce moment, il ne s'agit que d'expliquer comment il doit être procédé aux comptes que les copartageans peuvent se devoir, et aux fournissemens à faire à chacun d'eux.

Le compte et les fournissemens portent sur trois objets principaux: 1o ce qui a été reçu pour le compte de la succession; 2° ce qui a été dépensé pour elle; 3° les dommages causés aux biens de l'hérédité. C'est là ce qu'on appelle les prestations personnelles, dont les héritiers doivent se faire respectivement raison.

6. En règle générale, chacun des héritiers doit partager avec les autres tout ce qu'il a reçu et même tout le bénéfice qu'il a fait à raison de la succession. Prospicere judex debet, ut quod unus ex heredibus ex re hereditaria percepit, stipulatusve est, non ad ejus solius lucrum pertineat. L. item ex diverso 19, ff. fam. ercisc.

Ainsi d'abord, chaque héritier doit tenir compte à ses cohéritiers de toutes les sommes ou effets qu'il a reçus, soit des fermiers, locataires ou acquéreurs des biens de la succession, soit de tous autres débiteurs quelconques, et s'il a joui des immeubles d'une succession, il doit compte des revenus.

Cependant, si les sommes ou les effets qu'il a reçus, sur une créance de la succession, n'excèdent pas sa portion virile dans cette créance, il n'est pas tenu d'en faire rapport à la masse commune, à moins qu'il n'ait donné quittance au nom de la succession. Il a

pu recevoir pour son compte personnel ce qui lui appartenait pour sa portion virile, et il doit être présumé n'avoir reçu que pour lui, s'il n'y a pas de preuve qu'il ait eu la volonté de recevoir pour

tous.

Les autres héritiers ont pu se faire payer comme lui, et en conséquence, si le débiteur devient insolvable, ils supportent seuls la perte, sans pouvoir rien répéter contre le cohéritier qui a reçu. C'est ce qui résulte de la loi 38, ff. fam. ercisc., et l'on ne peut opposer dans l'espèce la disposition de l'art. 1849 du Code civil, puisque les héritiers ne sont pas des associés, et que les dettes, tant actives que passives, de la succession, se divisent entre eux de plein droit.

7. Lorsqu'un héritier a formé une action, exercé un droit ou fait un traité, sur une chose qui appartient à la succession, le bénéfice qui peut en résulter doit, en règle générale, profiter à tous les héritiers. Si, par exemple, il avait obtenu d'un créancier de la succession une cession pure et simple de la créance, avec une remise plus ou moins considérable, le bénéfice de la cession deviendrait commun à tous les héritiers. Il serait censé avoir agi pour l'intérêt de tous.

Mais si, dans la cession ou la quittance qui lui aurait été consentie, il n'avait obtenu la remise que de sa part ou portion virile dans la dette, ou d'une portion moindre, et qu'il eût été stipulé que la remise n'était accordée qu'à lui seul, ou bien si c'était en forme de donation que la cession lui eût été consentie, dans l'un et l'autre cas, le bénéfice ne serait que pour lui seul, et il en devrait être de même à l'égard de tous autres actes où il n'aurait agi qu'en son nom, que pour sa part et non pour la succession.

8. Chaque héritier qui a fait des dépenses pour la conservation, l'entretien ou l'amélioration des choses héréditaires, doit en être remboursé sur la succession, ou par ses cohéritiers, chacun pour sa part et portion.

Il ne peut néanmoins en demander le remboursement, si elles n'ont pas été utiles à la succession.

Mais, pour juger de leur utilité, il faut se reporter au moment où elles ont été faites. Lorsqu'à cette époque elles étaient néces

saires ou utiles, peu importe que, par un événement postérieur et imprévu, la succession n'en ait pas réellement profité. L'héritier, ayant eu de justes motifs pour les faire, ne doit pas être responsable des événemens.

Il faut néanmoins distinguer, entre les réparations, soit aux héritages, soit aux bâtimens, celles qui étaient nécessaires, celles qui étaient utiles, et celles qui n'étaient que de pur agrément.

Celles qui étaient nécessaires doivent être entièrement remboursées.

Celles qui étaient seulement utiles ne doivent être remboursées que jusqu'à concurrence de l'augmentation de valeur qu'elles ont donnée, au moment de leur confection.

A l'égard de celles qui ne sont que de pur agrément, et qui n'ont pas réellement augmenté la valeur du fonds, le remboursement ne peut en être exigé; mais l'héritier qui les a faites peut enlever ce qui en a été l'objet, pourvu qu'il puisse enlever sine rei detrimento, et en rétablissant les choses telles qu'elles étaient avant.

Dans tous les cas, les dépenses faites par un héritier ne doivent lui être remboursées que jusqu'à concurrence de ce qu'elles ont dû coûter. Si, par sa faute ou son inexpérience, il a dépensé plus qu'il n'en aurait coûté à un père de famille prudent et éclairé, il ne peut exiger qu'on lui rembourse l'excédant.

Quant aux contestations qu'il peut avoir élevées ou soutenues pour la succession, il ne peut en répéter les frais, si elles étaient évidemment mal fondées de sa part.

Enfin, s'il a payé, en totalité ou en partie, des dettes de la succession, pour prévenir ou arrêter des poursuites, il doit être remboursé, sur la succession, de ce qu'il a payé pour elle.

Dans tous les cas, les intérêts lui sont dus à compter des paie

méns constatés.

9. Lorsqu'un héritier a causé du dommage, ou aux affaires, ou aux biens de la succession, il doit indemnité à ses cohéritiers.

Ainsi, lorsqu'il a négligé d'entretenir ou de réparer un bien dont il a joui, et que cette négligence a causé des dégradations, lorsqu'il a laissé perdre, à défaut de poursuites, une créance dont il s'était chargé de faire le recouvrement, dans tous les cas enfin

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